Chapitre 4 –  Tout bascule du côté obscur


Entre le 26 et 30 ème km : le mystère

A partir du 25ème Km, j’ai commencé à rejeter atrocement tout ce que j’avalais. Au fur et à mesure, je perdais des forces de manière très inquiétante. Avec mes maux de ventre, je n’arrivais même pas à marcher vite. Curieusement, je suis resté serein en prenant les choses comme elles étaient. Cela restera donc un grand mystère pour moi.

Je me suis efforcé de ne pas m'arrêter au bord de la route, mais je n'avais déjà plus l'envie de courir. C'était un très mauvais signe parce que je n'avais définitivement plus de motivation pour les 100 Km de Millau. Toutefois, je voulais faire l'effort pour rendre le dossard à la fin du marathon. Je voulais juste me reposer. Pour la première fois, je ne pensais à rien. JE VOULAIS JUSTE M’ALLONGER dans un endroit frais. Comment expliquer cet état de fatigue sans précédent et aussi brutal !!??

J'ai fini par trouver le fait de courir sur du bitume très ennuyeux. Tant que je courais, ce n'était pas trop grave. Il a fallu en plus que le soleil soit au RDV! Il n'y avait pas beaucoup d'ombre et c'était de ça que j'avais besoin aussi.

Soudain, un accompagnateur vélo me proposa de l'aide pour soulager mon épaule avec mon Camel Back pendant un moment. Cela m'avait effectivement fait du bien. C'était la première fois que j'avais trouvé mon Camel back si lourd. Le type en question m’avait fait remarquer:
- C'est lourd ton sac ! Déjà que c'est une course pas facile, mais tu compliques plus les choses avec ça. Tu n’es pas en train de faire un trail et tu n’en n’as pas besoin pour la route, surtout à Millau.

Devant repartir, il m'a rendu mon Camel Back! De nouveau, je l'ai ressenti.

Par chance, Barbie et Ken (CAF) sont arrivés à ma hauteur. Ils ont pris mon Camel back pour le déposer à Millau. Je me suis senti tout d’un coup plus léger. Merci à vous 2 !

J’ai pu recourir un tout petit peu. Alors que je m'apprêtais à me reposer au bord de la route, Gilles m'interpella :
- ça va Ronald ? Que t'est-il arrivé ?
Je lui expliquais un peu ma mésaventure avec mon problème de santé. Merci à toi aussi pour tes encouragements même si j'étais trop K.O pour repartir.

Pour l'assurer parce que je ne voulais pas trop le retenir sachant qu'il était accompagnateur vélo, je lui ai dit que ça ira et que je vais au moins finir le marathon. Bien évidemment, cela ne s'est pas arrangé si bien que j’ai dû faire un break au prochain ravitaillement.

Là aussi, c’était très curieux que j’ai décidé de m’arrêter naturellement au marathon. En tout cas, ce fut bien long étant donné que je marchais lentement, sans même essayer de courir.

Au 30 ème Km : Plus de force et au revoir 100 km

Je crois que c'était au ravitaillement  du 30 ème Km que je me suis arrêté un long moment. J’avais perdu la notion de temps et de distance comme si je n’avais plus de repère. J’étais totalement déconnecté.

Il n’y avait rien à faire, à part attendre que cela se calme. Je rejetais tout ce que j’avais avalé la veille. C’était à cet instant que j’avais accepté naturellement qu’il valait mieux que j’abandonne et tant pis pour les 100 Km de Millau. Moi, je ne pensais qu’à ma santé et rien d’autre ! A vrai dire, j’avais totalement oublié la course et c’était ma santé qui me préoccupait.

Voyant que j'étais vraiment dans un drôle d’état, un gentil couple vint vers moi en me demandant avec une voix pleine de compassion :
- Tu vas bien? Tu veux boire ou manger quelque chose? Si tu as besoin de quelque chose, nous sommes là.
- Non merci, ça va aller. C’est très gentil. J’ai juste besoin de repos.
Quelques minutes plus tard, ils m'apportèrent un sandwich avec un bon barbecue en me disant :
- Tu es un privilégié par rapport aux autres. Faut que tu manges pour prendre des forces.

Ce n'était pas moi qui ne voulais pas manger un si bon sandwich. C'était juste que je n’arrivais même pas à manger de peur de encore tout rejeter, surtout que j’avais mal au ventre.

Pour ne pas définitivement rester assis là, je me  suis décidé à repartir pour arriver à Millau.

En m’asseyant sur ce banc à l’ombre, le sandwich à la main avec ce verre de coca cola, j’étais content malgré le fait que j’avais décidé que ce sera pour une prochaine fois les 100 Km et me disant l’esprit serein :
 - Je suis bien « The Imperfect and Lucky Runner ». Dis-je en souriant et en me moquant de moi-même parce que c’est bien ce que je suis finalement. A quoi bon se voiler la face ?

En temps normal, personne ne m’aurait tendu la main. Je remercie ce gentil couple de leur gentillesse.
Après cette vérité sur ce que je suis, je continuais ma route avec l’intention d’arriver à Millau.

Chapitre 5 pour découvrir la suite...